Les très significatives réponses des généralistes aux questionnaires réitérés depuis belle lurette, par exemple parmi d’autres, celui, déjà ancien, du « Quotidien du Médecin » (numéro du 7 mars 1995), et les articles nombreux qui régulièrement soulèvent cette question, indiquent l’extrême nécessité, quoi qu’on dise, de rompre le médecin à la relation avec son patient.
Le savoir scientifique et le savoir-faire technique, conditions sine qua non de la compétence médicale, ne suffisent pas plus à faire le médecin, qu’à prendre soin de l’homme souffrant. La formation à la relation médecin-malade-maladie (et non pas seulement médecin-malade) devrait être reconsidérée dans ses exigences spécifiques. Elle n’est pas fondée sur l’intersubjectivité, mais au contraire sur son absence. C’est précisément cette absence et ce qui vient à sa place – tout ce qu’imagine le médecin de « son » malade, et tout ce qu’imagine le malade de « son » médecin -, qui mène le jeu de ladite « relation ». Cette relation se spécifie d’un lien particulier où le médecin a à se repérer. A quelle place met-il son malade ? A quelle place le malade le met-il et de quelle place lui répond-il ? Pourquoi répond-il ainsi à celui-ci et pas à celui-là à propos d’une même situation pathologique ? A son insu le médecin s’implique subjectivement plus qu’il ne le pense et plus qu’il n’est souvent prêt à l’admettre. Et cela s’appelle le transfert.
C’est cette implication transférentielle qui peut faire l’objet d’un travail de prévention, un travail de repérage en petit groupe. Il permet, à partir de cas personnels apportés et discutés par les participants, sous le sceau du secret, de cerner, de serrer au plus près toutes les dimensions de la question, et ainsi de prendre en compte les effets transférentiels au sein desquels les place leur pratique médicale. Un effet d’enseignement s’en recueille qui bénéficie à chacun dans sa pratique professionnelle, mais aussi dans toute sa vie relationnelle. Quand on veut guérir, il faut aussi prévenir.