Depuis ce brûlot que fut la publication de ce texte, Die Frage der Laienanalyse (1926), – La Question de l’analyse profane -, la psychanalyse, nommée par Freud psychoanalyse dès 1896 comme une discipline scientifique spécifique et autonome, aura mis plus de trois quarts de siècle à se faire publiquement accrocher par sa question sociale et politique, laquelle peut s’énoncer ainsi : << la psychanalyse : pour quoi, pour qui, par qui et comment ?>>. Il faut dire qu’elle n’aura jamais été trop aidé en ce sens par ses psychanalystes mêmes, plus enclins à se déchirer et promouvoir le « narcissisme de la petite différence>> qu’à se rassembler pour mieux se définir.
De cette question, elle ne pourra, sans doute, désormais plus faire l’économie, sinon, ni plus ni moins, au risque de sa disparition. A tout le moins de sa noyade dans le varié marécage des psychothérapies, et son exclusion au titre de sa soi-disante obsolescence du champ de la psychiatrie bio-médicalisée et cognitivo-comportementalisée. Une psychiatrie, qui plus est, dans sa majorité, épouse le DSM V avec la bénédiction des instances officielles de l’Etat.
Oui, la psychanalyse pourrait bien se révéler être une discipline mortelle…
Mais, selon la remarque, tardive, de Lacan, qu’il faut certainement être sacrément mordu par Freud pour entreprendre une analyse et devenir psychanalyste, la psychanalyse, aujourd’hui encore, mord-elle ?
Si oui, sur quoi et qui ? Mais aussi et surtout, à quelles conditions sa morsure risque à nouveau d’entamer demain encore ce monde ?
La psychanalyse est une pratique particulière du transfert qui, chose curieuse, produit des effets. Des effets de sujet. Ce qui n’est pas, comme on peut s’en douter, sans conséquences pour ce monde, lui-même virant déjà par endroits à l’immonde.